Année 2012

A – L’année 2012

L’objectif de notre association est de lutter contre l’engravement du lit du Doux et le risque d’inondation qui en résulte. Nous voulons obtenir réparation des conséquences des aménagements du Rhône.

L’année 2012 a vu l’aboutissement de certaines de nos revendications. Plusieurs dossiers sont en cours,certains sont bien avancés, mais aucun n’est à ce jour achevé.

Comme tous les ans nous avons assisté à toutes les réunions où nous étions invités, quel que soit l’organisateur (la CCT, la CNR, les communes de Tournon ou de Saint Jean de Muzols, l’Association des Rivières de Rhône Alpes), nous avons également assisté au dernier Comité Territorial de Concertation du Plan Rhône.

Cette année nous avons innové en organisant en octobre une conférence sur les fleuves et rivières, ce fut une vraie réussite avec Gilbert Cochet comme intervenant.

Faisons le point sur chaque secteur concerné par nos revendications.

B – De la confluence avec le Rhône jusqu’au pont de l’ancienne RN86

Nos demandes ont enfin abouti ! En 2011 la CNR avait obtenu l’autorisation de prélever 95 000 m3 de sédiments mais les intempéries de fin d’année n’avaient permis d’en ôter que 30 000 m3 . Il en restait donc 65 000 m3, c’est le volume que la CNR dit avoir prélevé entre septembre 2012 et février 2013. C’est la première fois qu’une telle quantité de sédiments est retirée en aval du pont de la RN 86. Ce dragage devrait permettre un abaissement de la ligne d’eau en cas de crue d’environ 40 cm.

Mais le barrage de Bourg les Valence existe toujours, les sédiments vont de nouveau s’amasser, il faut donc obtenir un entretien régulier et/ou une surveillance de cette zone. Nous avons donc adressé cette requête et posé plusieurs questions par courriel à la CNR, je vous livre ici la réponse faite par un représentant de la CNR:

«Concernant notre intervention d’entretien du lit du Doux, effectivement, comme vous avez pu le constater et comme nous l’avons indiqué à M. le Maire de St Jean, les éléments climatiques et hydrologiques ne nous ont pas été favorables et ne nous ont pas permis de terminer l’ensemble de l’opération conformément au projet.

 Je tiens cependant à vous rassurer, la partie hydraulique est faite et les sections d’écoulement sont bien réalisées de manière à retrouver les conditions qui prévalaient après la mise en service de l’aménagement de Bourg Les Valence. Seul le décapage des îles n’a pas été terminé, mais cet aménagement n’apporte pas de gain significatif sur la ligne d’eau. En revanche, cela conduira certainement à atteindre les conditions d’une future intervention plus rapidement.

 Compte tenu de ces éléments, une intervention complémentaire n’est pas nécessaire, d’autant plus que les autorisations administratives sont désormais échues.  Les travaux projetés par la CCT en amont du pont de la 86 ont pour objectif de remobiliser les matériaux accumulés. Pour autant cette action naturelle ne se produira que lorsque le Doux subira un épisode de débit adapté (dit morphogène) qui concernera aussi la zone d’intervention CNR. Il n’y a donc pas de prévision de délai.

 Dans tous les cas, la CNR maintient une surveillance régulière des fonds du Doux et, si les mesures montrent une sédimentation suffisante, elle déclenchera à nouveau une démarche d’entretien. Statistiquement, la périodicité d’intervention devrait être de 10ans, mais cela dépend éminemment des épisodes de crue.»

D’autre part je vous rappelle que nous demandons depuis 7 ans l’acquisition par la CNR de la rive droite du Doux au niveau de la confluence afin de régulariser une situation administrative anormale. En 2010, la finalisation de ce dossier nous était promis pour la fin mars 2011. Les réponses de la CNR sont toujours prometteuses : «Pour les acquisitions des terrains situés en rive droite, les démarches sont en cours, et les premiers accords de principe sont obtenus.»

Nous sommes malgré tout satisfaits du résultat obtenu.

C – Le Doux à l’amont du pont de l’ancienne RN 86

L’étude géomorphologique du bassin versant du Doux commandée par la CCT a donné son verdict en 2011. La solution proposée, en complément de la dévégétalisation, scarification et charruage de la surface des bancs, est la création de deux chenaux de 500m de long, 20m de large et 1,5 m de hauteur. Le volume de matériaux terrassés sera de 30 000m3 .

Les actions de dévégétalisation et scarification seront faites sur les bancs de petite hauteur, elles répondent aux possibilités de remise en mouvement des matériaux lors de crues inférieures aux crues quinquennales ; pour les crues plus importantes ce sont les chenaux qui permettront une érosion régressive des bancs, ceux ci seront donc crées sur les atterrissements de plus grandes hauteurs. Dans les deux cas, l’objectif est la remise en mouvement des bancs de graviers lors des crues, s’en suivra un abaissement de la ligne d’eau en temps de crue et une diminution de la mise en charges des digues.

La CCT a fourni aux services de l’État les dossiers nécessaires à l’obtention d’autorisation des travaux préconisés par l’étude. Mais la DREAL (direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) a demandé un complément de dossier, or du coté de la CCT, tout est prêt pour débuter les travaux en septembre, le maître d’œuvre est le bureau Géoplus.

Comme pour la confluence, l’état d ‘engravement de la partie endiguée devra être contrôlé régulièrement, l’étude prévoit de définir un état de référence (état à ne pas dépasser et à partir duquel une intervention est obligatoire); il est également prévu de lever des profils tous les cinq ans ou lors de crue supérieure à une crue quinquennale. Il est aussi proposé une prise de vue aérienne tous les cinq ans.

De notre côté, notre analyse est la suivante :

Sur les volumes à prélever : le total des opérations (CNR + CCT) donne un volume de 130 000 m3 alors que pour revenir à la situation sédimentaire de l’année 68 (date de création du barrage de Bourg les Valence) il faudrait en enlever environ 288 000 m3 soit plus du double ! Peut-on croire que le Doux va pouvoir évacuer les 158 000 m3 restants? Combien de crues seront nécessaires ? Quel débit devront-elles atteindre pour remobiliser les sédiments stockés depuis 45 ans ?

Si comme on peut le supposer, la différence entre les sédiments «entrants» et les sédiments «sortants» est positive, les atterrissements vont de nouveau croître et entraîneront une nouvelle intervention. Or ces travaux étant dommageables pour certaines espèces de la flore et de la faune il vaut mieux les renouveler le moins souvent possible alors pourquoi ne pas prélever une plus grande quantité de sédiments ? Cela permettrait une baisse plus importante du niveau des eaux, une diminution de leur poussée sur les digues et retarderait l’urgence d’une nouvelle intervention.

Sur la date des travaux : Les dragages réalisés par la CNR vont permettre une augmentation des vitesses de transit et remobiliser les matériaux stockés dans la partie endiguée. Il est important de traiter la partie endiguée au plus vite pour profiter au maximum des effets engendrés par les dragages à la confluence. Espérons que le complément de dossier prenne peu de temps et ne perturbe pas le calendrier d’intervention.

Sur la gestion du bassin versant : L’interaction entre la végétalisation des versants et la dynamique hydraulique est connue et a été exploitée, les versants étaient boisés pour limiter le ruissellement et l’apport de matériaux solides dans la rivière. C’est un moyen de lutte contre les crues. Or, aujourd’hui les versants du Doux (dans cette partie avale) sont déboisés (habitations et agriculture) sans mesures compensatoires. Il serait pourtant judicieux de stopper cette déforestation ou au moins d’engazonner le maximum des surfaces pour réduire les volumes déversés dans la rivière. Nous devons obtenir une politique cohérente de l’ensemble du territoire en intégrant la gestion des versants à la gestion de la rivière.

Sur la diversité des solutions proposées : en complément des actions proposées par le bureau d’étude et d’une gestion plus globale du territoire nous demandons des créations de zones d’écrêtement de crues et des zones d’épanchement de crues. Même de petite taille elles permettraient de réduire les vitesses et d’abaisser la ligne d’eau en cas de crue.

Ceci étant dit nous sommes très impatients de voir les travaux commencer.

D – Les PPRI (plan de prévention du risque inondation)

L’étude préalable à l’élaboration du PPRI est alarmante: en cas de crue centennale, non seulement il y a risque de débordement mais également de rupture de digues avec pour conséquence 3m d’eau dans certaines maisons riveraines. Il est urgent et impératif de conforter les digues.

Le PPRI a été imposé aux élus, nous avons demandé son report afin d’effectuer les travaux permettant de réduire les risques et ainsi, de limiter les zones rouges du plan. Lors d’une réunion publique, le représentant de la Préfecture nous expliquait qu’il était absolument impossible de retarder la validation d’un PPRI.

A Tournon, la validation du PPRI a été retardée car il mettait en péril l’économie locale par le biais de l’entreprise Trigano.

A Saint Jean, le PPRI a pris du retard pour cause de calendrier politique, l’enquête publique est actuellement en cours.

Il faut rappeler que le confortement des deux digues doit être réalisé pour que le PPRI soit révisé à Tournon comme à Saint Jean. Mais nous savons très bien que pour obtenir une révision des zones il faudra encore se battre. Rappelons que des habitations très anciennes n’ont jamais été inondées mais se voient placées en zone rouge.

Notre demande : Les travaux envisagés sur le lit du Doux et sur les digues ont pour but de réduire les risques existants, nous demandons que le PPRI tienne compte de cette réduction de l’aléa. Le PPRI ayant été retardé nous demandons qu’il ne soit validé qu’après révision à l’issue des travaux concernant le lit et les digues. Nous sommes très déçus de la façon dont l’État répond à la problématique inondation.

E- Les digues du Doux

Les études de danger concernant les digues ont dénoncé un risque de débordement et un risque de rupture en cas de crue centennale. Les digues sont du domaine communal mais les maires de Tournon et de Saint Jean se sont entendus pour mener de front les dossiers des deux communes. Ils ont choisi le bureau d’étude Artélia comme maître d’œuvre.

Le montant des travaux est estimé aux environs de 5 millions d’euros pour les deux communes, 40% pourrait être financés par le fond Barnier. Nos élus comptaient sur une aide de la Région mais celle-ci refuse le moindre financement. Le Conseil Général n’a pas donné sa réponse. Les travaux ne commenceront pas tant que le financement n’est pas trouvé.

Notre position : L’État a une grande part de responsabilité dans la situation dans laquelle nous nous trouvons ( autorisation des barrages, délivrance des permis de construire, négligence d’entretien du lit du Doux), il doit réparer les erreurs du passé et participer majoritairement aux frais occasionnés. D’autre part, les barrages du Rhône étant en partie responsables de l’engravement du Doux (en période de crue le Rhône remonte bien au-delà de la concession de la CNR) il serait normal que la redevance payée par la CNR serve à financer des travaux pour sécuriser des zones habitables. La Région et le département veulent attirer les touristes avec des projets très coûteux (ViaRhona, Grotte Chauvet, mastrou, …), le Doux et ses riverains ne méritent-ils pas autant d’attention que les projets touristiques ?

Que se passera-t-il en cas de rupture de digues ? Qui portera la responsabilité des dégâts occasionnés ? Quel sera le coût de la réparation des digues en cas de rupture ? Et qui payera la facture? N’est-il pas plus raisonnable et économique de conforter correctement et rapidement les digues afin d’éviter les ennuis qui ne manqueront pas d’arriver sinon.

Notre colère est de plus en plus grande devant ce constat : la solution existe mais nos élus de la Région ont décidé d’utiliser l’argent public à d’autres fins. Quand au Conseil Général la réponse est attendue

F – Vers un Contrat de rivière

Suite à une convention signée par les cinq communautés de communes concernées par le Doux et ses affluents, la CCT a la compétence «rivière». Cette compétence sera conservée lors de la fusion de la Communauté du Tournonais avec celle du Pays de l’Hermitage en 2014. Cependant, la CCT a déjà engagé les démarches en vue de la création d’un contrat de rivière.

Il faut en moyenne 3 à 6 ans pour mettre en place cette structure. Une autre solution était possible : la création d’un SAGE (schéma d’aménagement et de gestion des eaux) ou d’un syndicat de rivière. Mais la mise en place n’est pas plus rapide et un contrat de rivière peut très bien se transformer en SAGE. Une des différences entre ces deux structures est que le contrat constitue un engagement moral et que sa non-exécution n’a pas de conséquences juridiques alors que le syndicat de rivière a une obligation de résultat.

G – CONCLUSION : une année en demi-teinte

Cette année a vu la réalisation du dragage par la CNR et nous nous en réjouissons. Il est urgent de réaliser les travaux de la partie endiguée car comme l’a souligné l’ingénieur du bureau Hydrétudes : « le niveau d’atterrissement actuel constitue un seuil critique à ne pas dépasser» . Il est inadmissible que le confortement des digues ne soient pas réalisé rapidement. Nous devons espérer que tous les efforts fournis par ailleurs ne soient pas vains, il serait désolant de subir un débordement ou une rupture de digues par manque de finances. Lors du dernier CTC (Comité Territorial de Concertation) du plan Rhône un administratif a déclaré : « Quand on veut avancer vers le même but on y arrive toujours » ; apparemment la Région n’a pas pour but de protéger sa population.

En 2013, nous devons maintenir notre présence dans les structures gérant notre territoire, nous battre pour que les confortements de digues soient réalisés et rester vigilants pour éviter de se retrouver dans la situation critique que nous connaissons. Nous devons obtenir une gestion plus globale de notre territoire en intégrant les versants. Des questions restent sans réponses : Pourquoi ne pas obtenir une baisse de la ligne d’eau plus sécurisante ? Vaut-il mieux évacuer des populations ou des sédiments ?

« Les grands changements semblent impossibles au début et inévitables à la fin »

Bob Hunter

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