A- quelques rappels sur les années 2000-2005
Au niveau local
Suite à deux pétitions, la première en février 2000 et la seconde en mars 2004 la sous préfecture organise une réunion le 6 septembre 2004 rassemblant les différents acteurs concernés par les inondations à Saint Jean de Muzols et Tournon : DDE, DDAF, CNR, DIREN, …ainsi que la Communauté de Communes du Tournonais, les maires des deux communes et les riverains .De notre côté nous avions invité trois associations à nous rejoindre : MNLE, LADENO et CRRA. .
Ce fut le début pour certains acteurs d’une réelle prise de conscience du problème causé par les atterrissements dans le lit du Doux et la création de notre association en novembre 2004.
En 2005, la communauté de communes du Tournonais finance une étude concernant le lit aval du Doux et acquiert la compétence rivière. Les communes de Saint Jean de Muzols et de Tournon, suite à des résultats d’études sur les digues et les problèmes d’écoulement des eaux de pluies et de ruissèlement effectuent les travaux nécessaires.
Il ne faut pas perdre de vue que ce problème des atterrissements du Doux et, d’une manière générale les inondations de 2003 dans la vallée du Rhône, sont directement liés à la politique de la CNR ; c’est pourquoi il s’avère très utile de voir ce qui se passe au niveau régional.
Au niveau régional
A la suite des crues de 2002-2003, une conscience collective est née : la nécessité d’une politique de gestion globale et cohérente du fleuve, afin de définir les véritables enjeux liés au fleuve.
En 2004, suite à l’appel du Grand Delta le 3 mars 2004, Georges Frêche, Président de la Région Languedoc-Roussillon/Septimanie, Michel Vauzelle, Président de la Région PACA et Jean-Jack Queyranne, Président de la Région Rhône-Alpes et l’établissement public Territoire Rhône , décident d’organiser les Etats Généraux du Fleuve Rhône.
Dès janvier 2005,de véritables ateliers de travail et d’échange ont donc lieu, associant l’Etat, les trois Régions riveraines, le Comité de Bassin Rhône-Méditerranée, l’Agence de l’eau, les usagers du fleuve et les riverains. Pour nous, les années 2004 et 2005 furent riches en réunions, colloques, journées thématiques; elles furent aussi l’occasion de comprendre, d’échanger, de rencontrer des élus, des décideurs politiques, des responsables de la CNR, de la DDAF, de la DIREN, de la DRIRE ,…. ainsi que des scientifiques, des chargés d’études….
Suite à ces Etats généraux du Rhône, le Comité Interministériel à l’Aménagement du Territoire a demandé en juillet 2005 à M. Lacroix, préfet coordinateur de bassin, de travailler à l’élaboration d’un Plan Rhône en concertation avec les trois Régions riveraines. Les Présidents de ces 3 Régions s’engagent alors à conduire une politique commune de gestion du fleuve Rhône axée sur la cohérence et sur la solidarité entre l’amont et l’aval.
B-NOS ACTIVITES DE L’ANNEE 2006
- Nous avons écrit un article dans la revue associative de LADENO, informant environ 180 adhérents de cette association des difficultés que nous avons pour obtenir réparation des dommages causés au Doux.
- Nous avons participé aux trois réunions du CTC Rhône moyen.
- La première a eu lieu le 7 juin 2005 à Valence, ce fut un premier contact et un lieu où nos remarques furent écoutées et entendues. En matinée, après une introduction à la stratégie globale de prévention des inondations nous avons assisté à quatre diaporamas :
• Organisation générale et principes directeurs par S. Alexis et AM. Levraut, DIREN de bassin.
• Histoire de l’aménagement du Rhône par J.P. Bravard, Université Lyon 2.
• Témoignage sur une approche globale de prévention sur le bassin de l’Isère par Ph. Sionneau,
• Synthèse de l’EGR sur les sédiments et pistes de gestion par B. Couvert, Cabinet SOGREAH
Puis nous avons pu exposer nos revendications, poser des questions. L’après midi nous avons participé à des ateliers : groupes plus petits et plus propices aux échanges entre riverains, élus, politiques.
- La seconde se fit à Saint Jean de Muzols le premier février 2006 et nous vous avions invités à participer par le biais d’un message déposé dans votre boite aux lettres. Notre participation fut fructueuse.
En matinée, divers diaporamas furent présentés :
• Le fonctionnement sédimentaire du Rhône et de ses affluents par Bernard Couvert, SOGREAH
• L’entretien du fleuve, le rôle de l’Etat par F. Colinet, DRIRE Rhône Alpes
• L’entretien du Rhône et les crues par E. Doutriaux . CNR
• Les cinq objectifs du plan Rhône par S. Alexis, DIREN de bassin
• La réduction de la vulnérabilité, la prise en compte réglementaire des risques dans l’aménagement du Territoire par H. Goetz, DDE de la Drôme.
• La réduction de la vulnérabilité, réduction des impacts des inondations sur les exploitations agricoles sur le Rhône aval par JM Fragnoud, CARM.
Puis des échanges ont eu lieu entre la salle et les intervenants. J’ai invité ceux-ci à regarder les photos des atterrissements du Doux, photos que j’avais exposées dans la salle. Et je leur ai posé quelques questions : « Pourquoi les affluents ne sont pas plus pris en compte dans le Plan Rhône ? Qu’est-ce qu’un fleuve sans ses affluents ? Quand nous parlera-t-on des atterrissements des affluents? Pourquoi la CNR ne respecte-t-elle pas son devoir de non-aggravation ? » La CNR répond ne pas devoir intervenir sur les terrains privés ; je fais alors remarquer que c’est pourtant ce qui se passe car, en élargissant l’embouchure et en refusant Doux de jouer son rôle de transport de matériaux, les terrains privés, en amont de la concession CNR sont comblés d’atterrissements.
Le compte rendu de cette réunion mentionne nos interventions: « Les représentants de l’association des Riverains du Doux demandent que la stratégie de prévention se préoccupe davantage des affluents » ; « ils rappellent que le Doux représente 900 km² de bassin hydraulique et que la problématique du dépôt des sédiments y est cruciale. Pour faire partager cette préoccupation, l’association a apporté des photos caractéristiques de ces problèmes dont le traitement ne semble pas le même que sur le Rhône. A l’embouchure du Doux, il y avait autrefois des compétitions d’aviron ou des joutes qui ne peuvent plus se dérouler du fait des atterrissements.».
Les scientifiquesremarquent un déficit de sédiments dans le Rhône et les plages méditerranéennes reculent par manque d’apport solide, nous avons alors rappelé que le Doux est censé apporté 8000m3 de sédiments au Rhône chaque année, ce qu’il ne peut plus faire car les sédiments, bloqués par le Rhône, s’accumulent dans la confluence et le lit aval. Le compte rendu poursuit : « Sur le Doux, la largeur de la confluence avec le Rhône a été multiplié par 2 ou 3 pour répondre aux modifications introduites par les aménagements de la CNR et maintenir un écoulement identique des crues .Les études ont montré que les atterrissements n’avaient pas d’incidence sur la ligne de niveau » et plus loin : « Aujourd’hui la valeur économique du fleuve géré par la CNR est concurrencée par la valeur paysagère, touristique ou culturelle .La question des inondations peut ainsi, dans un rapport de force, prendre le pas sur la question de l’hydroélectricité. »
Des ateliers furent organisés l’après midi, les échanges que nous avons eu avec Messieurs Pelese, Dutriaux et Vallès de la CNR et Monsieur Couvert, directeur du bureau d’étude SOGREAH travaillant pour la DIREN, furent animés .A la fin de cette journée ces personnes ont accepté de nous accompagner au bord du Doux. Monsieur Couvert propose d’étudier le cas du Doux au niveau de la DIREN et la CNR se dit prête à acheter la rive droite pour entretenir la totalité de la confluence.
Ce fut une journée très positive, l’exposition de photos, nos interventions, la distribution à tous les intervenants de l’article diffusé dans la revue Ladeno et du compte rendu de l’AG de 2005 et nos échanges sur le terrain ont permis aux représentants de la CNR, aux politiques et aux responsables des services de l’Etat, de mieux connaître notre association et nos revendications.
- La troisième s’est déroulée le 29 novembre 2006 à Valence. Nous avons pu nous rendre compte lors des divers exposés que le cas du Doux était souvent cité. Nous sommes reconnus par les divers responsables, que ce soit ceux de la CNR ou de la DIREN ; de même les scientifiques Monsieur Couvert, directeur de SOGREAH et Monsieur J.Paul Bravard, professeur à l’université Lyon 2 et coordonnateur de la Zone Atelier « Bassin du Rhône » sont venus nous parler de leur point de vue sur les travaux à envisager. Depuis le second CTC nous sommes en contact avec plusieurs de ces personnes.
3) En Mars 2006 nous avons envoyé un dossier accompagné de photos et d’extraits des résultats de l’étude de SIEE à Monsieur Le Président de la Région Rhône-Alpes ;Monsieur le Député de l’ Ardèche ,Messieurs Les Présidents du CTC Rhône Moyen, Monsieur le Président du Comité de Bassin Rhône-Méditerranée, Monsieur le Préfet coordonnateur de Bassin Rhône-Méditerranée , Monsieur le Président du conseil général de l’ Ardèche, Monsieur le Président de la communauté de communes du Tournonais, Monsieur le Directeur de la D.D.A.F., Monsieur le Directeur de la D.I.R.E.N. , Monsieur le Directeur de la Direction Régionale de la C.N.R. de Valence, Monsieur le Maire de Tournon et ses conseillers, Monsieur le Maire de Saint Jean de Muzols et ses conseillers, Monsieur le Président de la Confédération des Riverains du Rhône et de ses Affluents, Monsieur le Président de l’ association Ladeno, Monsieur le Président de la FRAPNA Ardèche, Monsieur le responsable de l’Agence de l’eau R.M.C., Monsieur Bernard Couvert, directeur de l’agence SOGREAH. Dans ce courrier, où nous reconnaissions l’avancement du dossier, nous dénoncions l’urgence de travaux de déblaiement, photos à l’appui.
4) En Juin nous nous sommes rendus à une réunion à Viviers, organisée par les députés de l’Ardèche et de la Drôme, Messieurs Terrasse et Besson .Nous avons de nouveau exposé le problème des atterrissements du Doux en présence de responsables de la CNR, de la DIREN, de Territoire Rhône, du Comité Interministériel à l’Aménagement et à la Compétitivité du Territoire (CIACT). Ce dernier étant l’instance qui a approuvé le Plan Rhône en mars 2006.
5) En juillet 2006 Mademoiselle Magali Dupont de la DIREN nous propose une rencontre en présence de Monsieur Bernard Couvert sur le terrain, les berges du Doux. Lors de cette rencontre nous apprenons que trois zones du Rhône ont été choisies pour une étude plus approfondie dont le Doux aval.
C- QUELQUES PRECISIONS
- La problématique de la confluence :
- L’élargissement du lit au niveau de l’embouchure, s’il maintient la ligne d’eau, ralentit considérablement la vitesse, interdisant ainsi la remobilisation des matériaux. Il ne suffit pas de maintenir une ligne d’eau, il est tout aussi, voire plus, important de maintenir une vitesse, c’est à dire une force suffisante pour évacuer les matériaux solides. Ceux-ci continuent de s’accumuler ; pour maintenir la ligne d’eau, faudra-t-il de nouveau élargir l’embouchure ? De combien ? Et encore combien ?
- La DDAF se moque de nous quand elle nous répond que la rivière évacuera elle-même les graviers lors des crues, elle semble oublier que le Doux est situé en amont du barrage de Bourg-lès-Valence. La rivière ne peut jouer son rôle que si le fleuve joue le sien, ce qui n’est pas le cas ici. Même dévégétalisés et scarifiés, les atterrissements ne disparaîtront que par une action de dragage, le Rhône étant un barrage pour le Doux. Il est désespérant de voir la lenteur des prises de conscience dont font preuve certaines administrations. La crue qui emportera ces atterrissements, ou même une partie, est vraiment à craindre car sa puissance devra être terrible.
- Dans ce contexte il est tout aussi urgent de régler le problème de la rive droite du Doux qui, je le rappelle, appartient à ITDT et non à la CNR. Cette zone n’est jamais entretenue et, en aval du pont de la N.86 les atterrissements sont plus végétalisés que la berge.
- La crue du 18 novembre 2006 démontre l’urgence qu’il y a à supprimer les atterrissements. Ils sont devenus si imposants que le courant est dévié, vient buter contre la berge avec une telle puissance qu’il déracine de beaux arbres. Plus rien ne protège la berge qui maintenant est à nue. L’érosion ne peut que s’amplifier et la zone de jeux de Saint Jean disparaitra à plus ou moins long terme. Comme nous le dénonçons depuis 2000, le Doux n’a plus la capacité de remobiliser les matériaux solides d’atterrissements d’une telle ampleur.
- Le 18 novembre 2006, encore une fois nous avons pu constater que si les atterrissements ne font que grandir en nombre et en volume, les berges s’érodent et les arbres qui la protègent disparaissent.
En formant des boisements continus le long des rivières, les arbres constituent une unité paysagère à forte valeur patrimoniale. Afin d’assurer une protection maximale des berges contre l’érosion, la ripisylve doit être dense et équilibrée. Equilibrée signifie qu’elle doit être composée de grands arbres (Aulnes, Frênes, Sycomore), d’arbustes (Saules, Aubépines, Cornouiller), d’herbes (massettes, joncs, laîches, graminées). Chacune de ses plantes va maintenir la terre des berges à une échelle différente. Ainsi, l’herbe va protéger une motte de terre dans ses racines, l’arbuste va protéger un grand nombre de ses mottes déjà fixées par l’herbe, et l’arbre va protéger quelques mètres de berges, cela s’appelle du « Béton vert ». Si un arbre est seul à tenir la berge, l’eau va peu à peu faire partir les fines particules de terres et déstabiliser le grand arbre. De la même manière, s’il n’y a que de l’herbe sur la berge, l’eau finira par faire s’écrouler un pan entier de la berge. En plus de protéger les berges, la ripisylve joue un rôle important d’abri et de source de nourriture pour un grand nombre d’animaux (insectes, oiseaux, rongeurs). Pour les habitants de la rivière (poissons, insectes), ce sont les racines qui servent d’abri (les protégeant du courant et des prédateurs). D’autre part, elle crée de l’ombre sur la rivière ce qui permet de garder l’eau assez fraîche pendant l’été et de limiter l’apparition des algues. L’entretien consiste à couper les arbres morts pour empêcher qu’ils ne tombent dans l’eau et à élaguer ceux qui menacent de tomber et d’arracher une partie de la berge.
Les arbres assurent l’équilibre des rivières et cours d’eau :
- ils stabilisent les berges grâce à leur système racinaire
- ils participent à la régulation hydraulique en diminuant la vitesse du courant
- ils contribuent à l’amélioration de la qualité de l’eau en filtrant les eaux qui les traversent
- ils apportent l’ombre nécessaire à la vie aquatique
- ils permettent à la vie aquatique de se développer en assurant l’interface entre l’eau et la berge.
D- ET MAINTENANT OU EN EST-ON ?
- La CCT a obtenu la compétence rivière, a engagé en mars 2006, pour un contrat de trois ans, une technicienne de rivière, Nelly Château. Elle a réalisé un plan d’entretien de tout le bassin versant, chaque EPCI a reçu la partie la concernant et est en charge de l’appliquer. En ce qui concerne les atterrissements de la partie aval, l’étude réalisée par le bureau SIEE n’est pas assez précise sur l’exact volume et les lieux des sédiments à enlever. Il faut donc de nouveau faire une étude pour obtenir ces précisions et mieux connaître le transport solide du bassin versant et établir un plan de gestion des points noirs. Un accord est espéré avec l’Agence de l’eau, pour que cette étude se limite, finances obligent, à la partie aval du Doux. On repart donc pour trois ans d’études, de dossiers, d’autorisations, etc. Bilan : on nous dit que les dossiers avancent, et c’est vrai : les dossiers s’empilent mais sur le terrain toujours rien de concret.
- La CNR dit vouloir acheter la rive droite (propriété d’ITDT) pour entretenir correctement la zone de confluence. Lors du dernier CTC, Monsieur Ribert, chef du pôle patrimoine de la CNR nous a confirmé que des contacts avaient été pris et désire nous rencontrer.
- La commune de Saint Jean poursuit ses travaux d’assainissement et de séparation des eaux pluviales et des eaux usées. L’année 2007 devrait voir se réaliser la modification du profil actuel de la digue du Doux en amont du nouveau pont SNCF.
- La commune de Tournon a fait des travaux d’entretien de dévégétalisation des digues. L’entretien des ruisseaux est régulier.
E- CONCLUSION
Si on regarde le chemin parcouru depuis la création de l’association on peut distinguer :
Des résultats positifs :
- Prise de conscience du problème : il n’est plus remis en cause.
- La CCT a obtenu la compétence rivière et a embauché une technicienne de rivière qui travaille à temps plein sur le dossier du Doux.
- Grâce à la mise en place des CTC et du Plan Rhône, la DIREN s’intéresse au Doux.
- Nous connaissons mieux nos interlocuteurs.
- Nos interlocuteurs connaissent mieux notre association et le problème qui nous préoccupe.
Des aspects négatifs :
- La prise de conscience n’est pas homogène dans les différents services que nous rencontrons.
- La méconnaissance de l’écologie des berges, de la vie d’une rivière, du rôle des arbres etc. conduisent parfois certains responsables à adopter une attitude ironique voire agressive.
- La lenteur des opérations : si la prise de conscience est réelle, l’aspect d’urgence n’est pas reconnu.
Nos revendications sont toujours les mêmes : (et je pourrais recopier la fin du compte rendu de 2005)
- L’enlèvement des atterrissements (demande depuis l’an 2000 !)
- La prise en charge de la totalité de la confluence par la CNR.
- L’entretien des berges afin d’éviter leur érosion.
- Redonner à la rivière sa capacité de transport des matériaux solides.
- Reconnaître l’urgence de nos demandes.
- La « renaturation » des lônes.
- Un entretien plus régulier du fleuve et de ses affluents.
Nos espoirs : que la rivière revive, que les berges soient ombragées, que les activités nautiques puissent reprendre et surtout que nous nous sentions en sécurité.